Le destin. Il ne sert qu’à faire chier son monde et ceux qui y vivent. Il n’existe pas. Du moins, pas pour moi, je ne le pense pas. Et pourtant, c’est à cause de lui que je suis devenue un monstre sanguinaire. Depuis, je le traque sans relâche, espérant ainsi réussir à le rattraper un jour. Ainsi, il serait obligé de me rendre ce qu’il me doit. La vie. Oui, ce lâche me l’a ôté alors que je parcourais tranquillement un marché sicilien aux côtés de ma famille, la veille de mon dix-huitième anniversaire. Nous étions vraiment tous ensemble ; mon père, ma mère, mon frère et moi. Pour une fois, nous n’avions pas cherché à envoyer les bonnes à notre place, nous voulions faire les choses nous même, faire en sorte que tout cela soit parfait. En plus, on s’amusait bien, avec mon frère qui rôdait autour des vendeuses, leur faisant des avances l’air de rien et les déstabilisant au possible. Pourtant, nous n’aurions pas dû. Nous aurions dû éviter ça. Je me rappelle que nous étions à deux doigts de partir lorsque le drame s’était produit. Nos courses étaient déjà partiellement empaquetées et il ne restait plus que quelques fruits sur la balance, attendant d’être pesés par la maraichère que son mari surveillait du coin de l’œil, la rendant nerveuse. Autant dire que tout était presque terminé lorsqu’il décida d’arriver. Mon destin. Forcément. Il était là, avec trois amis à lui – ou peu importe la façon dont il faut les appeler –, une sorte de foulards recouvrant chacune de leur tête et une arme à feu dans la main droite. Ils rigolaient bien tous ensemble, mais pas de la même façon. Leurs rires sonnaient plus faux et surtout, beaucoup plus cruels. Ses amis avaient approchés de la maraichère et tandis que l’un s’occupait de contrôler le mari rendu fou et l’autre écartant la pauvre femme, le dernier s’emparait de l’argent, fruit de leur travail. Les pauvres gens en étaient presque à pleurer, ce qui ne faisait qu’arracher un rire hystérique supplémentaire aux voleurs, fiers d’eux. Et lui restait là, les regardait et les laisser faire, sans rien dire de particulier. Il était pourtant celui qui m’impressionnait le plus, je ne saurais dire pourquoi. Quand ils eurent fini leur sale besogne, ils se reculèrent, lui laissant la place de façon à ce qu’il s’avance un peu plus. Il porta ses mains à son visages et en retira lentement sa cagoule. Son visage apparut aux yeux de tout le monde, du moins, de toutes les personnes présentes. Il était plutôt beau gosse, comme habité d’une jeunesse éternelle, et avait ses dents qui dépassaient de sa bouche, pointues et bien aiguisées. Ce fut comme un signal pour les deux autres, et ils se déployèrent dans l’ensemble du petit marché, cherchant des victimes à… Tuer. C’était leur seul mot d’ordre de toute manière, la seule véritable chose qui les motivait. Ils ne faisaient pas ça pour l’argent, oh que non. L’argent n’était qu’un motif parmi tant d’autres, une excuse facile à rajouter à une longue liste, car la seule chose qu’ils voulaient, était de sentir la présence d’un cadavre entre leurs doigts serrés. Ils avaient seulement ce besoin irrépressible de tuer, pour ensuite goûter au sang de leurs victimes. En fait, ils n’attendaient que ça. La mort. Le sang. Rien ne pouvait plus les motiver. Ils ne ressentaient plus l’adrénaline, ne pouvaient donc avoir l’impression de vivre qu’en autant les vies d’autres personnes. Trop occupés avec les autres personnes présentes, ils ne s’occupaient pas de nous. Ma mère avait peur, c’était visible aux cheveux hérissés sur sa nuque. Lentement, elle se tournait vers moi, essayant d’attirer le moins d’attention possible. « Cache-toi. Vite. » Je déglutissais difficilement avant de me précipiter sous la table voisine, servant d’étalage à un marchand. Je n’eus pas le temps de me cacher de ce que je m’apprêtais à voir. En effet, juste avant de me glisser sous la nappe, j’eus le temps d’apercevoir qu’il plantait ses crocs sur la gorge dévêtus de la maraichère. Cette parcelle de chair fraiche n’était qu’une offrande supplémentaire, comme une invitation à le laisser y planter ses crocs. Horreur. Les heures passèrent, ou plutôt les minutes, mais cela me parut réellement interminable. Je sanglotais doucement, essayant de faire le moins de bruit possible. Il ne fallait pas que je me fasse repérer. Et pourtant, je vis bien vite des pieds apparaître à côté de moi, puis des jambes lorsque la nappe fut écartée. Finalement, un visage apparu. Angoisse. Je le vis sourire – me sourire –, dévoilant alors ses immenses dents pointues. Mon cœur se mit alors à battre plus fort, palpitant à toute vitesse dans ma poitrine. De plus en plus fort, de plus en plus vite. Je n’en pouvais plus. J’angoissais autant qu’il était possible de le faire. Il était là, juste devant moi, me regardant avec une lueur indescriptible dans le regard. Et si je m’écoutais, je pourrais presque dire qu’il me regardait avec envie. Mon destin. « Allez, sors de là ma belle. Ce n’est pas comme si j’allais te manger. » souffla-t-il, un rire malsain s’échappant par la même occasion de ses lèvres. Comme envoutée, je me redressais sans réfléchir, m’extirpant de sous la table. Avais-je réellement le choix de toute façon ? Je les dévisageais tous. Ils étaient tous là, sans exception, me faisant face, portant des regards horribles sur moi. Des regards que je n’oublierais sans doute jamais. Et puis, il y en avait même un qui, l’air fier, arborait un mince filet de sang, qui s’échappait du coin de ses lèvres pour continuer son chemin le long de sa joue. Je déglutissais tandis que la pensée que j’allais servir de desserts à trois ‘vampires’ affamés, me traversait l’esprit. Je détournais le regard, le posant au sol, grave erreur. Cadavres. Ils étaient tous là, allongés sur le sol et visiblement sans vie. Toute ma famille réunie. Le sang coulait encore. Ils nageaient tous dans une grosse flaque à la couleur âcre. Je n’en revenais pas, les larmes me montaient aux yeux, qu’allais-je devenir ? J’étais finie, sans avenir. Et quelque chose me soufflait que moi aussi j’allais mourir, tout comme eux. Il s’approcha un peu de moi, remarquant sans doute que mon attention était focalisée sur les corps sans vie de ma famille, pour me murmurer au creux de l’oreille : « N’ai pas peur. Nous te réservons un tout autre sort. » Il laissa ensuite son visage glissait jusque dans mon cou, avant de me mordre l’épaule, formant ainsi une plaie légère qu’il commença à lécher. Doucement d’abord, puis avec folies et ardeurs. Au bout d’un moment, il s’arrêta. Je sentais son souffle contre ma peau nue et mon sang coulait légèrement de la plaie, formant une trainée de fraicheur mortelle. Terreur. « Tu en sais beaucoup trop. Tu ne peux rester en vie. Mais nous sommes déjà repus. Tu deviendras donc l’une des nôtres, pas de gâchis. » Que voulait-il dire ? Je ne comprenais pas, ne comprenais rien, j’étais complètement perdue. Et pourtant, c’était bien à moi qu’il s’adressait, mon destin, comme-ci j’étais censée savoir à coup sûr de quoi il était en train de me parler. Comme si j’étais une connaisseuse qui tenterait vainement de dissimuler son savoir. Je n’en pouvais plus. Un frisson me parcourait la totalité du corps, passant par ma colonne vertébrale. La peur. Qu’il en finisse. Cela devenait insupportable et je venais à la conclusion du fait que je préférais mourir que de continuer à me sentir aussi perdue. Je voulais rejoindre ceux qui avaient autrefois été ma famille. En finir. Il n’y avait plus que ça qui comptait à présent. Je ne voulais plus. Ne ressentais plus rien qu’un froid intense pourtant brûlant de terreur. Tant de sentiments contradictoires qui se bousculaient au portillon de mon esprit. Cela renforçait mon angoisse à chaque seconde, chaque minute. La haine. Il replongea alors sa tête vers mon épaule et je sentais clairement sa respiration, propulsant un souffle d’air frais contre ma peau. Une nouvelle fois, je déglutissais. Juste avant qu’il ne me morde violemment l’épaule, me laissant être traversée par un frisson. Mon sang se mettait à couler à une vitesse ahurissante. Il regardait cela avec un sourire narquois, visiblement fier de son travail. Après quoi, il portait son poignet à ses lèvres, s'ouvrant la peau à l'aide de ses incisives, il me collait alors sa plaie béante devant la bouche, faisant couler quelques gouttes de son sang entre mes lèvres entrouvertes. Après quoi, ils me poussaient violemment vers le sol, ma nuque heurtant la table de derrière, émettant un sinistre craquement tandis qu'elle se brisait sous le choc. […] Je me redressais difficilement, ayant de la peine à m’asseoir. La tête me tournait. A peine le sommet de mon crâne entrait-il dans la douce lueur restante du soleil, que je commençais à ressentir une vive douleur qui m’obligeait à me reculer. Sans chercher à comprendre le pourquoi du comment, je me cachais sous la nappe de l’étalage derrière moi. Enfouissant mon visage dans mes mains, je revoyais les images de ce qu’il s’était passé. Choses horribles. Je commençais à sangloter tandis que le bruit de quelqu’un se trainant au sol, se faisait entendre. La tête de mon frère apparut alors sous la nappe, il n’était pas mort. Il vint me prendre dans ses bras, tandis que j’enfouissais ma tête dans son cou. Installés ainsi depuis un bon moment, je me rendais compte, d’un seul coup, de l’odeur qui émanait de l’autre côté de sa peau. J’eus l’impression que mes pommettes se craquelaient tandis que, sans réfléchir et guidée par une sorte d’instinct, je me jetais sur sa peau que je déchiquetais en charpie. Le sang qui commençait à couler dans ma poche me faisait me sentir de nouveau vivante. J’étais devenue un monstre.

« Ouvrez ! S’il-vous-plaît ! » je hurlais en tambourinant sur la porte en bois massif de ma voisine. Je jetais rapidement un coup d’œil derrière moi, la rue était encore plongée dans l’obscurité de la nuit, plus pour longtemps tout du moins. La porte finissait par tourner sur ses gonds, s’ouvrant sur une vieille femme, que je considérais comme un membre à part entière de ma famille. C’est elle qui m’avait accueilli lorsque le soleil s’était couché sur ma première journée en tant que vampire. Elle n’avait pas parut affolée le moins du monde face à ma nature surnaturelle et au fil du temps, j’avais appris à connaître ses aptitudes de sorcière. En fait, j’appris même qu’elle n’aidait pas spécialement les vampires en général, mais qu’elle ferait une exception pour moi à condition que je fasse tout ce qu’elle me demande. Comme aller lui cueillir des plantes, par exemple. Je tendais le panier rempli de pousses de verveines face à elle, prenant garde à ne pas frôler la moindre feuille de cette plante que j’avais appris à craindre à sa juste valeur. Elle m’adressait un sourire avant de me faire signer d’entrer : « Allez viens, profite de ta dernière soirée ici. » En effet, je devais partir dès le lendemain pour l’Amérique, persuadée que celui que j’appelais désormais Mon destin s’y trouverait, par bateau. J’adressais un sourire gêné à la vieille femme avant de pénétrer dans le hall et de me diriger vers le salon comme elle m’indiquait alors de le faire. Je m’asseyais sur le fauteuil, tandis qu’elle me jetait depuis la cuisine : « Mets toi à l’aise, j’arrive. » avec son accent sicilien bien marqué. Un sourire aux lèvres, je me laissais dériver dans mes pensées. A tel point que je ne l’entendis pas revenir. Ainsi, lorsqu’elle se plaça derrière moi, je ne pus retenir un léger sursaut de surprise, alors qu’elle passait une fine chaine en or autour de mon cou. « Voilà qui te facilitera la vie. Tu pourras penser à moi lorsque tu te baladeras sous le soleil américain. » me souffla-t-elle alors. J’haussais un sourcil, complètement perplexe et en incompréhension totale face à ses paroles. Je mis d’ailleurs un certain temps à comprendre ce qu’elle voulait dire par là, ne comprenant pas comment une créature telle que moi pourrait un jour remarcher au soleil de nouveau. C’est alors que je me souvins de la discussion que nous avions eu un soir, à propos d’un bijou ensorcelé permettant aux vampires de se promener de nouveau au soleil. Je fis rapidement le lien avec la chaine en or. Aussitôt, je me levais et faisais le tour du fauteuil, avant de me jeter dans ses bras, l’étreignant avec force. « Merci. Merci pour tout. » je lui soufflais, tandis que des larmes de joie se mettaient à rouler sur mes joues. Le plus dur dans le fait de quitter l’Italie, serait de dire adieu à la vieille femme, qui représentait alors mon unique famille.

Je me trouvais dans un bar en plein milieu de la ville. Le seul qui existait en fait. Il y avait du monde autour de moi, mais personne ne semblait remarquer mon humble présence. Lentement, je me levais et me dirigeais vers la sortie. Poussant la porte, je me retrouvais sur le parking. Je cherchais quelques instants mes clés dans ma poche. Quand je les eus retrouvé, j’appuyai sur le bouton d’ouverture des portières. La voiture en face de moi - qui était la mienne - émie un léger bip, tandis que l’on pouvait deviner qu’elle s’était ouverte. J’ouvris la portière, me glissai derrière le volant et sortit du parking. Je n’avais pas très envie de rentrer chez moi tout de suite, mais le fait que je ne parlais à personne dans ce bar, m’aidait à repartir vers ma maison sans réels regrets. Mais je me promis un petit détour avant de revenir à la case maison. C’est ainsi que je me dirigeais vers la forêt pour faire un tour en voiture dans ces bois. Alors que je roulais tranquillement et à une vitesse assez modérée, une chose vint perturber mon regard. Cela n’avait duré qu’un cours instant, comme ci une bête c’était déplacé à la vitesse de la lumière. Je me garai sur la bande d’arrêt d’urgence. Tout cela ne m’inspirait pas confiance, je préférais aller vérifier que rien de trop grave n’était en train de se passer. Je tournais en rond. J’avais décelé une odeur dans l’air ambiante. Et cela ne me disait rien de bon. J’avais l’impression que l’on m’observait, mais à chaque fois que je regardais l’endroit d’où venait cette présence imposante, il n’y avait personne. J’attendis ainsi plusieurs minutes, mais comme il ne se passait rien, je décidais de remonter dans ma voiture et faire comme ci de rien n’était. J’allais ouvrir la portière côté conducteur, mais on ne m’en laissa pas le temps. Je me fis sauter dessus par une bête féroce qui essaya de m’arracher la tête. Je roulais au sol avec la bête. Un cours instant me fut donné où je pus voir la lune qui se découpait sur le ciel bleu de la forêt. C’était la pleine lune. Il ne me fallut donc pas longtemps pour connaître l’identité du fauve. Il était un loup-garou. Je fus sortie de mes pensées par un coup de patte sur le haut du visage. Le sang se mit à couler. On dit qu’il faut souffrir pour être belle. Moi, avec tout ce que j’ai enduré, je devrais être top model. Je passais ma main sur mon visage, retirant le flot de sang qui me coulait dans les yeux. Je n’avais pas mal, non. Ce n’était pas mon sang qui coulait, c’était celui de mes précédentes victimes. Je me redressais, prenant le loup-garou à la gorge, je le clouais au sol. Mais nous étions de forces égales, et il n’eut pas besoin de beaucoup de temps pour me reclouer au sol. Il me griffa la joue, mais il avait mis trop de force dans son coup de patte. Ses griffes transpercèrent ma peau, et sa patte atterrit bien vite dans ma bouche par l’intermédiaire de ma joue déchiquetée. Je retins un cri de douleur - mais seulement parce que la patte de la bête m’empêchait de crier. Mes yeux s’écarquillèrent tandis que je ressentais enfin une certaine douleur depuis un certain temps. Je me repris bien vite. Il était hors de questions que je me fasse liquider d’une manière aussi honteuse. Il fallait que j’intervienne avant que le loup-garou ne m’assène le coup de crocs mortel. Je mordis sa patte sans ménagement, il n’avait qu’à pas me la fourrée dans la bouche. Je fis une grimace quand mes canines transpercèrent la peau velue - et au goût immonde - du loup-garou. Mais bien vite, au fur et à mesure que je vidais le monstre de son sang, je sentis que sa peau se transformait, et que sa patte se transformait peu à peu en une main calleuse. Je lâchais prise. Le corps d’un homme nu s’écroula à terre avec fracas. Je ne le regardais même pas, profitant plutôt de cet instant de tranquillité pour examiner ma plaie à l’aide de mon portable que je pris en miroir. Il me l’avait bien déchiqueté, ma bouche, ce… ! Je me calmais. L’homme avait toujours le moyen d’arranger sa bêtise. Je me tournais vers lui. Je remarquais enfin qu’il était nu. Je fis la grimace, il était vraiment laid. Je ne pourrais boire son sang tranquillement avec une… Chose, aussi immonde devant les yeux. J’enlevais la vieille chemise qui recouvrait mes épaules pour la placer sur le corps de l’inconnu. Puis, je me penchai sur lui, et me mis à m’abreuver du reste de son sang. Quand j’eus fini, je tirai le corps par les pieds vers l’intérieur de la forêt. Je laissais la chemise sur lui, me retrouvant ainsi en tee-shirt à manches courtes. Il était hors de question que je la récupère après qu’elle ait été sur le corps de cet homme hideux. Ce n’était pas trop grave, ce n’était pas comme ci c’était ma chemise préférée. Mouais. « Va t'faire foutre. » Ce n’était qu’un faible murmure qui perçait dans le bruissement du vent, mais c’était largement suffisant pour que je perçoive la haine qui résidait dans ces paroles. Je fis la grimace, il devait certainement se passer quelque chose également de ce côté-là de la forêt. Je pris de nouveau mon portable, et regardai encore une fois la plaie. Elle était déjà presque entièrement cicatrisée. C’était parfait, je ne risquais pas d’effrayer comme ça. Mais une odeur vint me titiller l’odorat, elle provenait de mon tee-shirt. Ma chemise partiellement ouverte lors de l’attaque, avait laissé passer le sang du loup-garou. Ce n’était pas trop grave, je ferais avec. Je me mis donc à me déplacer à vitesse vampirique vers l’endroit d’où venait la voix. Un homme avait passé une ceinture autour de sa jambe pour stopper une hémorragie. Je me précipitais vers lui. Ce n’était pas parce que j’étais un vampire sanguinaire que j’en oubliais les bonnes manières que l’on m’avait enseigné lors de ma vie d’humaine. Je passai une main derrière son dos pour soutenir l’homme. « Je vais vous aidez, ça va aller. » Le visage de l’homme se tourna vers moi. Je reconnaissais ses traits, je l’avais déjà vu quelque part. Sur le coup, j’en fus terrorisée. Je crois que je ne serais pas venue à son aide si je m’étais doutée que ce serait lui. Tristan.

« Tout ça est débile. Tout ce qu’on fait est débile. Je ne sais même pas à quoi on sert. Nous sommes futiles ! N’importe quel chasseur ferait mieux que nous ! » Des fois, je doutais vraiment quand au fait que rejoindre ce groupe de chasseurs soit une bonne idée. Après plus de cinq rassemblements pour chasser ensemble, nous n’avions réussi à ne faire qu’une seule victime. Et bien sûr, les membres du gang me détestaient de plus en plus. Non seulement à cause du fait que j’étais sans arrêt désagréable – j’en ai bien conscience –, mais aussi par le fait que seulement peu d’entre eux comprenaient pourquoi j’avais adhérer à ce gang qui avait pour principal but de tuer les personnes de mon espèce. Autant dire que chaque minute passait à œuvrer pour le gang était une minute où je risquais la mort. Et pourtant, je continuais de venir à chaque rendez-vous. Je ne savais pas vraiment pourquoi je faisais ça alors que je me mettais constamment en danger, mais je me rappelle que ma première idée était qu’à long terme, plus personne ne puisse oser sans prendre à moi tellement j’aurais fait d’efforts pour lutter contre les vampires les plus dangereux – en m’excluant, bien évidemment. J’avais été bête de le penser vu le nombre d’ennemis que j’accumulais, mais je voulais tout de même continuer l’aventure. Non seulement parce que cela était devenu un passe-temps, mais aussi parce qu’ainsi, je pouvais éliminer la concurrence. « Mais je t’ai déjà dit que je n’allais pas tarder à me transformer, et qu’une fois que je serais transformée, je pourrais éliminer plus de vampires en le moins de temps possible. Alors, laisse-nous le temps de nous mettre en route ! » siffla une lycan particulièrement énervée. « Eh bah, dépêche-toi. J’ai pas que ça à faire moi ! » je soupirais, passablement énervée moi-aussi. La lycan se détourna et se mit à siffler quelque chose entre ses dents. Ne faisant pas d’efforts pour comprendre ce qu’elle disait à cause de mon agacement, je ne pus que deviner ce qu’elle avait dit. Sûrement un truc comme : « Elle fait chier celle-là. » ou l’une des conneries habituelles du même genre que l’on me servait à la pelle. Je poussais un soupir d’impatience afin de bien montrer mon mécontentement. Je me retournais pour aller marcher un peu plus loin du groupe de chasseur. Ainsi, je faisais les cent pas derrière un bosquet lorsque j’entendis un hurlement humain. Un hurlement d’agonie. Sans réfléchir, je me précipitais vers mes coéquipiers, tout en brandissant mes pieux à bout de bras. Si le moindre vampire les attaquait, il serait plus facile pour moi de leur venir en aide rapidement si je lançais les pieux en bois directement sur eux. Mais à la place d’un vampire dévastant tout sur son passage, je fus bien surprise de voir un paquet de vêtements à terre duquel sortit un loup qui paraissait très jeune. Les autres me regardaient avec une lueur de malice dans le regard, tout en poussant des ricanements débiles. Je mis un certain temps à comprendre ce qui allait se passer ensuite. Un temps qui suffit au loup pour s’élancer vers moi. « Oh… Shit. » Envoyant valser tous mes pieux derrière moi, je partis en courant à travers les bois. Le loup me suivait, mais j’espérais le distancer assez vite pour ne pas recevoir cette morsure tant redoutée, celle qui me serait fatale.

Le soleil était en train de se coucher, il ne procurait plus que quelques rayons d’une lumière vacillante. Et pourtant, il faisait chaud comme jamais. Les nombreux humains que je croisais, semblaient sur le point de mourir tellement ils avaient chaud. Je n’avais jamais supporté les chaleurs suffocantes comme celle-ci. Pas que cela me fasse quelque chose, non. Bien au contraire même. Je ne ressentais pas la chaleur, à proprement parler. Par contre, je pouvais sentir la transpiration provenant de chaque être que je croisais, et cela était plus qu’embêtant vu l’odorat surdéveloppé que nous possédions, nous autre, vampires. Les gens se précipitaient dans les endroits climatisés les plus proches qu’ils trouvaient. A défaut de se rendre chez eux, ils allaient donc dans les bars. Et forcément, il était hors de question que les barmans laissent des personnes profitaient de leur climatisation si elles ne consommaient pas. Donc au final, cette chaleur surhumaine faisait bien leur affaire. Comme quoi, contrairement à ce qu’ils affirmaient en général, ils n’avaient absolument pas honte de mettre des personnes complètement saoules à la porte de leur bar à deux heures du matin. Quelle bande d’hypocrite ! En fait, cela m’irait peut-être bien de travailler dans un bar… Oui, non. Bon d’accord. Je ne travaillerais jamais là-bas, cela m’inciterait à consommer bien plus que je ne consommais déjà. Et cela me ruinerait, moi qui étais déjà fauchée. Je continuais de marcher dans la rue principale de Mystic Falls. Je n’arrivais presque plus à me retenir de hurler aux gens de s’acheter un bon désodorisant pour leurs aisselles, tellement ils sentaient fort la transpiration. Je finis donc par bloquer ma respiration, pour ne plus avoir à supporter ces odeurs qui me pourrissaient totalement la soirée. Il n’y avait plus qu’à attendre que le soleil disparaisse complètement pour que la chaleur s’estompe, d‘autant plus que le vent soufflait fort. En regardant les quelques rayons restant du soleil, j’aurais dit qu’il ne restait plus qu’une vingtaine de minutes avant que les habitants de Mystic Falls et moi-même, n’ayons à dépendre de la clarté lunaire. Vingt minutes durant lesquels je devrais trouver quelque chose à faire, puisque je voulais absolument agir de nuit. Vous l’auriez certainement deviné, cette nuit était ma nuit. Celle où je pourrais enfin me venger de tous ces incapables qui me pourrissaient la vie. Me venger de ces vampires qui faisaient passer ceux de notre espèce pour des rigolos desquels on ne devait pas avoir peur. A partir de cette nuit, grâce à elle, tout cela aller changer. L’un des vampires les plus connus de la ville et le plus admirer par un bon nombre d’humains - humaines surtout, en fait -, ou tout du moins était-il peut-être légèrement moins connu que les frères Salvatore mais vous comprendrez l’idée, allait entrer dans une rage folle et il pourrait ainsi montrer de quoi nous autre étions capables lorsque nous étions énervés. Avec ça, l’une des vampires les plus futiles que je n’ai jamais vus, allait montrer ce dont nous étions capables lorsque nous étions pris d’un chagrin d’amour. Et grâce à moi, tous les vampires du monde pourraient enfin s’estimer heureux d’être crains à leur juste valeur, et de ne pas passer pour une histoire de bonne femme. Mon habituel sourire narquois reprit aussitôt sa place sur mon visage tandis que je pensais à cela. Et oui, grâce à moi, nous serions enfin craints comme il le fallait ! Le pire était que j’avais calculé tout cela en prenant bien soin d’établir une barrière en ce qui me concernait. Comme ce ne serait pas moi qui allais foutre un sacré bordel en ville, ce n’était pas moi qui serais pourchassée par une horde de chasseur en colère, pas moi qui mourrais. Ah, la belle vie. Plus qu’à me trouver un coin pour admirer le carnage, ainsi qu’un paquet de pop-corn. Et pourquoi pas, me trouver aussi un verre de sang frais et une bouteille de whisky ? Oui, ce serait sûrement mieux ainsi. Prendre de quoi admirer tout en restant discrète pour ne pas risquer de me faire tuer. En quelque sorte, je respectais ainsi les conditions que Tristan avait fixées quelques temps avant cela. Je ne me mettais pas vraiment en danger, puisque je me contentais de rester sur le bas côté et de contempler ce qui se passait ensuite. Ainsi, je ne me mêlais à rien d’autre qu’à ce que j’avais prévu au départ. Il me suffisait juste de trouver Esther lorsqu‘elle serait seule, et le tour était joué. Ainsi, je faisais d’une pierre deux coups. Je me vengeais à la fois de Naomie et de Dwight - même si j’avoue que c’était plus la vengeance contre Naomie qui me plaisait - et je faisais craindre les vampires par réaction en chaîne. Elle est pas belle la mort ? Ah ah ah, c’était pas drôle. En tout cas, la chance était avec moi en ce qui concernait cette aventure. Sinon, comment aurais-je eut vent d’où Esther allait passer la soirée, sans chercher à le savoir ? Oui, vous avez parfaitement compris. Cette fois, mes actions étaient vraiment bien planifiées. Je n’en faisais pas qu’à ma tête, tout cela était bien réfléchie. J’étais tellement perdue dans mes pensées que je ne voyais pas l’heure passait. En effet, lorsque je regardai ma montre, cela faisait déjà une trentaine de minutes que j’avais prévu le coucher du soleil. Et effectivement, le soleil était déjà couché. La lune n’était pas encore haute dans le ciel, ce qui faisait que la ville n’était éclairée que par la clarté de quelques étoiles ainsi que par les vieux réverbères qui avaient du mal a éclairé correctement les rues. Le tout procurait une sorte d’obscurité malsaine qui me convenait tout à fait. La chasse pouvait enfin commencée. « Esther, à nous deux. » Lançant un dernier regard derrière moi, je montais dans la voiture que j’avais empreinte un peu plus tôt dans la journée. La voiture qui était censée me ramenait jusqu’à elle. Je ne pris pas la peine de mettre ma ceinture avant de mettre en route le moteur. Le trajet serait court. Ainsi, je fis s’engouffrer la vieille Chevrolet rouge dans une des petites ruelles de la ville. J’éteignis le moteur, puis j’ouvris la portière avant de descendre. Je commençais à m’éloigner dans la ruelle avant d’appuyer sur le bouton de la clé permettant de fermer la voiture. Je ne savais pas pourquoi, mais si je rendais la voiture dans un sale état - ou si je ne la rendais pas du tout -, je ne pourrais pas m’empêcher d’éprouver une pointe de remord. Et seul Dieu sait que cela ne me ressemblait pas du tout. Au milieu d‘une ruelle, je m’arrêtais. Je me cachais dans l’ombre d’un mur, tandis qu’un bruit de pas raisonnait dans la ruelle. Une personne déboucha au coin d’un mur, marchant tout droit dans ma direction. Esther. Ou plutôt devrais-je dire ma future-première victime ou encore la première personne que j’allais transformer en vampire, mais il faut tout de même avouer que c’est vraiment moins commode.

Là, vous avez droit à un beau petit changement de système de temps, parce qu'écrire au passé, c'est vraiment pas facile finalement (a)

Je traine en ville depuis deux bonnes heures déjà. Je ne sais pas quoi faire. Les gens me regardent bizarrement et même la blonde du grill n’a pas daigné me saluer lorsque je l’ai croisé. De toute façon, je ne préfère pas trainer près d’elle puisqu’Esther ne doit pas trainer bien loin. Je continue à me balader, parfois dérangée par les railleries d’adolescents particulièrement débiles. J’ai besoin de changer d’air mais même être à l’extérieur ne m’aide pas plus que ça. Je regarde ma montre tandis que je passe devant une nouvelle boutique du centre ville. Midi. Trois heures que je traine en ville. Je lève la tête et mes yeux se posent sur le panneau de la nouvelle boutique. Cabinet du Dr Curtis : Spécialiste en recherches. Comprenez par là que ce fameux docteur est l’un des nombreux chasseurs de vampires de Mystic Falls. Je fronce le nez. Les chasseurs de Mystic Falls dont Tristan ne fait plus partir. Je soupir. Je ne sais pas comment j’ai fait pour me retrouver là-dedans. Je suis entrée dans le cabinet du Docteur et cherche maintenant sont bureau. Il n’y a personne à l’accueil. Je m’avance dans l’étroit corridor, jusqu’à atteindre une porte entrouverte sur laquelle une petite plaquette indique l’entrée du bureau du docteur. De l’intérieur s’élève des bruits de pages que l’on tourne. J’en conclus que le nouveau chasseur de la ville est toujours dans son antre – sa planque à lui. Je toque à la porte avant de la pousser légèrement. Elle n’est pas bien huilée et elle émet donc un léger grincement. « Qui est là ? Je ne souhaite être déranger par personne, rappelez-vous en bien. » Je pousse un peu plus la porte avant de pénétrer dans la pièce. Je balance un peu mes bras, tandis que je me mors la lèvre pour empêcher mes larmes de couler. Je sens qu’elles me montent aux yeux ces saloperies. Je n’ai pas pleuré depuis plus de cent trente années consécutives et voilà que je pleure deux fois dans la même journée, cela fait bien mon affaire ! En effet, je n’arrive pas à retenir mes larmes, qui se mettent à couler à flots le long de mes joues. Sans comprendre comment je fais pour en arriver là, je me retrouve à genoux, mes cheveux formant un rideau devant mon visage baissé. Mes larmes coulent de plus en plus. J’ai le cœur brisé. Je crois que quelques parts, je regrette tout ce que j’ai pu faire ces derniers temps. La dernière fois que j’ai vu Tristan, c’était avant d’aller transformer Esther ; au milieu de l’été. Je l’ai quitté précipitamment et je ne l’ai pas revu depuis. Je regrette tellement d’être partie en prétextant que j’avais une réunion pour avoir un travail. Car en plus, les dernières paroles que je lui ai dites, n’étaient que mensonges. Les avant-dernières, c’est autre chose par contre. Je me souviens très bien avoir articulé un dernier « Je t’aime. » trop furtif et pas assez sincère à mon goût. Lentement, je relève la tête. Mes yeux humides, font que ma vue est toute brouillée. La tâche de couleur que forme la silhouette du docteur m’aide cependant à savoir où il se trouve. Je le fixe. Ou plutôt, je fixe un point de lui, je ne sais pas exactement lequel. « Je… Je… J’aimerais vous... Vous... Vous parler. De… De… De vampire à… A… A chasseur. »

Je m’affale sur le canapé et allume la petite télévision posé sur mon buffet. A peine me suis-je confortablement installée, que j’entends sonner à la porte. Je me redresse en grommelant et éteins la télévision avant d’aller ouvrir. Un grand blond à l’air pas très sûr de lui, m’attend derrière la porte. Il m’apporte un mot du Docteur. Tiens, justement, j’ai pensé à lui aujourd’hui. Je remercie grandement le blond avant de lui proposer d’entrer et de lui servir quelque chose, un grand sourire qui se veut rassurant sur le visage. Il refuse poliment et c’est limite s’il ne s’enfuit pas en courant. Tant pis. Je rentre de nouveau dans l’appartement, ferme la porte derrière moi. Je vais m’installer à la table de ma cuisine. Les traits de mon visage sont crispés tandis que je me demande ce que peut bien contenir le papier. Je le déplie et y lit quelques mots inscrits d’une écriture manuscrite et assez peu joli au regard. Une écriture d’homme, évidemment. Celle du chasseur, à l’évidence. « Dois vous parler. Maintenant. Docteur Curtis. » Et bien oui, il a signé, alors cela ne fait aucun doute : c’est bien son écriture. Mon visage se décontracte un peu tandis que je me dis qu’il n’a peut-être pas oublié notre accord, finalement. […] Et voilà. C’est la deuxième fois aujourd’hui que je me retrouve devant le cabinet du Docteur. Je n’ai toujours pas envie de croiser des gens dans le coin – pas envie de m’éterniser comme on dit – mais je crève tout de même d’envie, de savoir ce que le chasseur me veut. Je pousse donc la porte du cabinet après avoir regarder à droite et à gauche de la rue, que personne ne peut me voir rôder par ici. A peine suis-je rentrée qu’une clochette sonne pour faire comprendre mon arrivée, un peu comme dans les magasins. Aussitôt, le blond venu me rapporter le mot un peu plus tôt, vient me voir, un air interrogateur collé sur le visage. Je ne veux pas le mettre mal à l’aise, à le laisser me poser des questions qu’il n’a – de toute évidence – pas envie de me poser, alors j’enchaîne avant qu’il me dise que je peux parler. « Serait-il possible de voir le Docteur ? Il m’a donné rendez-vous. » J’adresse un grand sourire au blond tandis que je secoue le bout de papier qu’il m’a lui-même rapporté quelques temps plus tôt, comme preuve de ce que je lui avance. Décidément, cette journée pue sent la bonne nouvelle. Le blond me dévisage un court instant avant de me faire signe de le suivre. Je marche donc à sa suite jusque dans le couloir dans lequel j’ai déjà pénétré et je m’arrête en même temps que lui, devant ce que je sais être la porte du bureau du Docteur. Le blond toque deux coups secs à la porte avant de dire : « Monsieur, Miss Lewis est ici. » Puis il tourne la tête vers moi, recommence à me dévisager. Je lui adresse un sourire timide. Je ne veux pas paraître malpolie. Mais au fond, pour autant que j’en sache, je n’en ai rien à faire de paraitre malpolie aux yeux de ce type ou non. Je veux juste voir le chasseur pour qui il travaille. Lui, à la limite, je pourrais le vider de son sang sans aucun remords. Sauf que ce n’est ni le moment ni l’endroit pour me lancer dans un tel acte de barbarie. De toute façon, mon esprit est ailleurs. Je pense juste à Tristan. Parce que c’est bien de Tristan dont il est question aujourd’hui, non ? De toute évidence, oui. Sinon, je ne serais pas là, à attendre derrière une porte en bois massif. « Faites-là entré je vous prie. » Le blond actionne la poignée de la porte pour l’ouvrir afin de me laisser entrer. Je lui adresse un bref signe de tête en guise de remerciement avant qu’il ne referme la porte derrière moi. J’ai l’impression qu’il n’a pas réellement confiance en moi. Qu’importe. Je ne suis pas venue ici pour que la majordome de Monsieur ait confiance en moi. Je suis venue pour ce que j’espère être une bonne nouvelle. D’ailleurs, le chasseur me fait signe de m’asseoir d’un geste lent de la main. Il me désigne le fauteuil où il m’avait déjà obligé à m’asseoir la fois dernière. Alors je m’exécute, parce que je sais qu’il ne commencera pas ses explications tant que je ne me serais pas assise. Oui, parce que le Docteur est un peu maniaque sur les bords. Sauf qu’au lieu d’être maniaque avec des objets, il est maniaque avec les gens. Chacun son vice. « Une tasse de thé ? » Exactement la même remarque sarcastique que la dernière fois. Cela devient comme une habitude. A croire qu’il aime se moquer de moi. Pourtant je ne lui ai rien fait. Du moins, je ne lui ait pas encore fait quelque chose. Peut-être que cela viendra après, qui sait ? En tout cas, je ne me formalise pas de sa remarque. Je me contente de lui sourire poliment, attendant qu’il débraille sur le sujet. De toute façon, pour le moment, je ne peux m’empêcher de sourire. Car même si le chasseur ne m’a pas confirmé qu’il veut me parler de Tristan aujourd’hui, j’ai déjà ma petite idée en tête. Même qu’elle est bien encrée dans mon esprit. C’est simple : je ne pense plus qu’à ça. C’est pour cela que je souris comme une idiote. Rien que le fait de savoir que je vais enfin pouvoir avoir des nouvelles de Tristan, me rend heureuse. Peu importe qu’elles soient bonnes ou mauvaises, je veux juste entendre son prénom prononcé par la voix de quelqu’un d’autre, au moins encore une fois. Enfin, je sais tout de même que si les nouvelles sont mauvaises, je risque de m’effondrer. De tomber à genoux sur le sol, les larmes roulant sur mes joues ou je ne sais quoi d’autre encore. Mon humeur est vraiment instable en ce moment. Je n’arrive plus à être aussi impartiale qu’auparavant, n’arrive pas à retrouver mes envies et mes humeurs sadiques d’avant. Je ne suis plus la même Ambre. Ou du moins, je le pense réellement. A croire que j’essaye de changer, comme-ci mon ancienne personnalité avait pût être responsable du départ de tristan et qu’en changeant un peu, il pourrait revenir vers moi plus facilement. « Miss Lewis, la prochaine fois que vous voulez me demandez quelque chose… Inutile de vous enfuir, compris ? » J’acquiesce en silence, me mords la lèvre inférieure. Des réprimandes. Je ne m’y attendais vraiment pas en pénétrant ici. Mais voilà que je m’en prends tout de même à la figure. Comme quoi la vie est belle et bien une loterie où tout peut nous tomber dessus sans prévenir. Je finis finalement par monter mon regard vers le visage du Docteur. L’un de ses sourcils est arqué, certainement en signe de désapprobation. J’en ai un haut-le-cœur. Comme je le disais donc, mon humeur est vraiment instable ces derniers temps. Sinon, comment pourrais-je avoir peur d’un simple sourcil en temps normal ? C’est une situation improbable, qui n’est pas censée se produire, qui plus est. « Comment savoir si j’ai pris votre demande en charge autrement ? » Une nouvelle fois, je baisse les yeux et mords ma lèvre inférieure. Tout ce que dit le chasseur, je le prends sur moi comme des reproches. Et cela fait mal, vraiment très mal. Je relève finalement les yeux vers lui, ayant du mal à empêcher une larme de naitre au coin de mon œil. « Excusez moi, j’étais effondrée. Je ne voulais pas vous… M’infliger de devoir me voir dans un tel état. » Je pose de nouveau mon regard au sol. Mes yeux croisent l’épais tissu d’un magnifique tapis de sol. Je relève aussitôt les yeux, me contentant de désigner le tapis, de mes deux mais ouvertes en signe d’impuissance. « J’aurais pût ruiner votre tapis de sol ! » Aussitôt, les larmes me viennent aux yeux. Je ne supporte pas l’idée que l’une de mes larmes s’échoue sur le tapis. Alors forcément, euphémisme le plus complet possible, je m’apprête à pleurer alors que je suis juste au-dessus du dit tapis. C’est comme-ci je cherche à me faire du mal moi-même. Mutilation. C’est le mot exact de ce que je suis en train de faire inconsciemment, comme ça, sans pouvoir m’en empêcher. L’horreur totale en somme. Au lieu d’être sadique envers les autres, je le suis envers moi-même. Je suis un monstre à moi toute seule. Une erreur de la nature en somme. Je respire un bon coup pour refouler mes larmes. « Je sais où est Tristan. » Impossible de continuer à refouler mes larmes : je fonds en pleure. Une nouvelle fois, oui. Je regarde tout de même le Docteur, à travers mon rideau de larmes. Dans mes yeux, on peut sûrement lire une énorme gratitude. Gratitude que je lui porte. Le sentiment de lui devoir quelque chose à tout jamais, également. Et malgré mes larmes, j’arrive tout de même à articuler quelque chose d’à peu près audible, à l’attention du chasseur. « Et… Et… Et, il va… bien ? » C’est tout. Je ne saurais pas placer d’avantage de mots de toute façon.